mercredi 29 novembre 2017

« MAINTENANT, C'EST PLUS PROBABLE, UN TRIOMPHE DE GUILLIER » ?

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LE PRÉSIDENT DU PARTI COMMUNISTE,
LE DÉPUTÉ GUILLERMO TEILLIER
Guillermo Teillier, président du Parti communiste du Chili (PCCh), face au deuxième tour, a signalé la nécessité de conduire « de manière intelligente » « les accords de programme » et de les atteindre. 24 novembre 2017
Le PCCh est-il satisfait du résultat des élections parlementaires ?
Pas à cent pour cent, non. Effectivement nous avons avancé, nous avons réussi à élire huit députés, nous avons augmenté leur nombre, ce qui était un objectif. Nous avons été le seul parti de la Nouvelle Majorité (NM) à augmenter nos voix, non de manière spectaculaire, mais elles ont augmenté, le seul parti à ne pas avoir diminué en voix, et nous avons augmenté en pourcentage. Nous avons récupéré un bon nombre de votes que nous avions perdus aux dernières élections municipales dans la Région Métropolitaine (RM), ce qui nous réconforte. Nous n’avons pas abouti à l'élection d'un sénateur, ce qui était l'un des objectifs les plus fermes que nous avions.

Que signifie la non élection de Lautaro Carmona comme sénateur ?

Cela veut dire que nous aurons à nous appliquer plus la prochaine fois. Dans quatre ans il y a des élections sénatoriales et nous devrons poursuivre nos efforts jusqu’à rompre notre exclusion du Sénat. Nous regrettons beaucoup que Lautaro n'ait pas été élu, il a été un grand député pour cette circonscription, il méritait d'être sénateur et il en avait toutes les capacités. Maintenant, ceci ne signifie en rien la fin de la vie politique de L. Carmona, il est secrétaire général du PCCh et en tant que tel il devra poursuivre sa tâche avec beaucoup de responsabilités et de fonctions dans le futur.

Les autres députés du PCCh ont tous été réélus, ceci a une connotation politique.

Ceci veut dire que les député(e)s de notre parti ont bien accompli leurs missions, ont bien fait leur travail, et ça, les gens l’ont reconnu dans toutes les circonscriptions où nous avons été réélus. Nous sommes sûrs que si Lautaro s’était présenté à la réélection comme député, il aurait lui aussi réussi. Il me semble qu’il y a eu une reconnaissance par le peuple de notre action, de notre travail, de notre engagement envers les demandes sociales et les réformes. En plus, nos deux députées réélues ont doublé leur nombre de voix dans leurs districts, permettant l’élection de leur colistier, elles ont obtenu une majorité élevée. Alors il me semble que ce qui s'est passé avec le parti dans cette élection est un fait politique important.

Mais il y a des éléments à revoir, des points d'autocritique, après les élections ?

L’analyse doit se faire, elle devra être critique et autocritique, indubitablement. Tout n'est pas parfait dans ces processus, nous n’allons pas en rester à la victoire et au positif. Nous devons examiner tout ce qui n’a pas été une bonne expérience, et ceci doit se faire avec beaucoup d’attention. Et sur plusieurs aspects, par exemple : comment a réellement agi l’ensemble du parti, comment ont été nos relations avec les organisations sociales, avec le mouvement social, comment nous avons assimilé les problèmes des gens. Nous devrions aussi nous interroger sur notre politique d’alliances, rappelons que nous avons signé un accord avec le Parti Socialiste (PS), pensant que ceci nous permettrait d'élire un sénateur et cela n'a pas porté ses fruits. Nous devrons conduire une analyse critique pour savoir quels facteurs externes ont influé pour que nous n’ayions pas pu élire un sénateur. Et il y a plusieurs autres choses sur lesquelles il faudra discuter. Nous avons décidé de réunir un Plenum du Comité Central après le deuxième tour des présidentielles, où tout devra être analysé et discuté.

Comment voyez-vous l’arrivée ou l’irruption du Frente Amplio (FA) ?

C’est un phénomène électoral pour partie, je crois qu'eux-mêmes ne s’attendaient pas à une irruption aussi forte dans la vie politique nationale. C’est un fait politique. Les explications sont encore sommaires, mais il en existe une, bien présente, et qui est qu'effectivement les gens veulent des changements dans le pays, veulent avancer plus rapidement. Le FA a eu l’avantage de ne pas être au Gouvernement, ainsi pouvait-il exprimer librement et avec plus de force toutes les politiques de réformes et toutes les demandes, sans les réserves de ceux qui participent au Gouvernement. Les membres du FA ont très bien mis à profit ce moment et cet espace politique, et leur pourcentage apporte en partie la preuve que les gens veulent des transformations, veulent aller de l’avant avec les réformes, pour donner aux changements un élan plus grand. Du point de vue de la stratégie à venir, ceci est bon.

C’est-à-dire que le PCCh aurait pu faire un score plus grand s’il n’avait pas été au gouvernement?

Je ne sais pas. Ce n’est pas le calcul qu’il faut nécessairement faire. Je crois que nous avons réalisé un bon pourcentage, car les gens nous ont vus nous battre pour les réformes, de manière décidée, sans hésitation, même ils nous ont vus très liés au monde social pour impulser ces réformes.

Alors, est-ce une dispute pour l’espace avec le FA qui s'est accentuée, ou bien est-ce que s’est ouverte une possibilité de coordination ? Comment devrait être la relation avec ceux du Front ?

Regardez, le PCCH n’a pas subi de perte d'électeurs. Au contraire des autres partis. La NM a perdu 900 000 voix à cette occasion et le FA en a gagné 900 000. Il faut additionner deux plus deux pour savoir ce qui est arrivé. Se sont déplacées beaucoup de voix qui, avant, allaient à la NM, précisément pour impulser la politique de réformes. Peut-être que maintenant, les électeurs sont désenchantés car on n’allait pas assez vite, car ils espéraient que les réformes se feraient de manière différente, alors ils ont voté pour le FA. Peut-être que le parti aurait pu croître plus, mais nous n’avons pas perdu de voix. Il va falloir voir comment nous allons nous adresser aux électeurs, avec l’idée principale, comme je vous le disais, de continuer l’approfondissement et la progression des transformations.

Comment  voyez-vous les 36% de Sebastiàn Piñera ?

Avec une odeur d’échec pour le candidat de droite. Car ses partisans pensaient, et ont fait penser à beaucoup de gens grâce aux enquêtes d'opinion manipulées, qu’ils allaient gagner au premier tour ou ils assuraient dépasser les 45% et arriver bien positionnés au deuxième tour.

Maintenant Piñera est en train de chercher l’électorat de l’ultraconservateur José Antonio Kast. Pourra-t-il y avoir une avancée vers des positions ultraconservatrices ?

Je ne sais pas comment il fera pour capter ces voix et ces positions, qui ne sont pas seulement ultraconservatrices, mais qui sont à la limite du fascisme qui a régné au Chili avec (Augusto) Pinochet. Mais il devra être porteur de cette partie de la droite. Ceci doit être un motif d’inquiétude, car un Gouvernement de droite supposé, en plus de reculer sur beaucoup d’aspects, de tirer vers l’arrière des réformes et des droits, d'attenter à la stabilité de la fonction publique, se chargerait aussi de ce secteur qui souhaiterait revenir encore plus en arrière, avec des mesures ultraconservatrices.

« Que notre candidat dialogue beaucoup avec le pays »

Une victoire de Alejandro Guillier semble plus probable qu’avant ?

Bien sûr qu'un triomphe de A. Guillier est plus probable maintenant, bien que ce ne soit pas facile. Je ne fais pas de comptes euphoriques, c'est difficile, mais si nous travaillons bien, si nous nous attachons à faire une bonne campagne, si nous nous conduisons de manière intelligente, si nous travaillons bien avec les accords programmatiques et en cherchant d'autres, indubitablement ceci rend la victoire de Guillier plus probable.

Comment le PCCh se situe face à ces trois semaines de campagne du deuxième tour ?

Nous allons nous engager totalement dans la campagne, nous allons contribuer au maximum au triomphe de Guillier et à réussir l’appui des autres forces. Nous allons persévérer pour que continue cette discussion démocratique sur les transformations dont le Chili a besoin.  

Où mettriez-vous l’accent dans cette phase de la campagne ?

Je pense que notre candidat doit communiquer énormément avec le pays, avec les gens, dans les régions, communiquer très bien sur le programme, dire franchement quels sont les changements qu’il va réaliser. Nous devons reproduire ceci dans les conversations avec les gens, donner des arguments, garantir le vote. Avec ceci, faire bien toutes les autres tâches d’une campagne comme celle-là. Ceci est fondamental.

Comment évaluez-vous le facteur Michelle Bachelet dans cette période politique ?

La Présidente, dès le moment où elle a accompli le programme promis au peuple il y a quatre ans, a créé les bases pour continuer le processus de changements. Michelle Bachelet, en ouvrant ce chemin de réformes et transformations que demandent les gens, a beaucoup apporté. Il y a un certain temps les sondages la plaçaient très bas - bien que maintenant nous voyons que les sondages mentent ou sont utilisés politiquement, voire inventés -, mais nous voyons que la Présidente continue d'être très appréciée par une partie du peuple. Il y a une enquête, qui n'a pas été publiée, qui montrait que Michelle Bachelet gagnerait les élections contre S. Piñera si elles avaient lieu aujourd'hui.

Et certains voulaient se tenir à distance d'elle ou mettaient en question sa gestion.

LE PRÉSIDENT DU PARTI COMMUNISTE,
LE DÉPUTÉ GUILLERMO TEILLIER
C'était une erreur. Prendre ses distances avec elle, c'était prendre ses distances avec le processus de réformes que nous devons continuer à mener. Certains se sont trompés en pensant cela. Mais ils ont repris la bonne route en revendiquant et valorisant le travail de la Présidente et le rapprochement qui s'est opéré entre A. Guillier et M. Bachelet est très bon et ceci est positif pour la campagne.

Traduit par NB et JC