vendredi 9 octobre 2015

AU CHILI, LES RÉFORMES DE MICHELLE BACHELET SONT EN PANNE

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LE COSTANERA CENTER, SANTIAGO DU CHILI
La cote de popularité de la présidente socialiste, Michelle Bachelet, est au plus bas, avec moins de 30 % d’opinions favorables. La présidente a reconnu, en juillet, qu’il lui sera difficile, d’ici à la fin de son mandat, en mars 2018, de concrétiser les réformes promises pendant sa campagne électorale, qui avaient soulevé d’immenses espoirs. Beaucoup considéraient ce second mandat de Mme Bachelet, qui avait déjà gouverné entre 2006 et 2010, comme une opportunité historique pour en finir avec l’héritage de la dictature militaire (1973­-1990).

« Regarder la réalité en face »

Pour remédier aux profondes inégalités sociales, elle avait promis une nouvelle Constitution, une réforme fiscale et la gratuité dans l’éducation. Des défis qui n’avaient pas été relevés pendant la transition vers la démocratie par la coalition de centre gauche, au pouvoir entre 1990 et 2010.

« Il n’est pas question de renoncer aux changements, mais de regarder la réalité en face, affirme Michelle Bachelet. Nous disposons de moins de ressources, et la capacité de l’Etat et du système politique pour opérer des réformes structurelles si profondes, en si peu de temps, a sans doute été surestimée. » La prévision de croissance a été rabaissée de 3,6 % à 2,5 % pour 2015.

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La présidente a dû réviser sa feuille de route : la gratuité dans l’éducation supérieure sera mise en place graduellement, à partir de 2016 et jusqu’en 2020, pour 60 % des étudiants les plus pauvres, et non plus 70 % comme prévu. La réforme fiscale, promulguée en 2014, a été mal accueillie et doit sans cesse être corrigée. L’objectif est de collecter 8,3 milliards de dollars (7,3 milliards d’euros, près de 3 % du produit intérieur brut) pour financer la gratuité de l’éducation. Enfin, le texte définitif de la nouvelle Constitution, qui doit remplacer celle imposée en 1980 par le général Augusto Pinochet, est toujours en examen au Congrès.

Rumeurs de démission

Mme Bachelet est la cible quotidienne de la presse, de droite dans son ensemble, qui dénonce un vide politique. À deux reprises, la présidente a démenti d’insistantes rumeurs selon lesquelles elle envisageait de démissionner. Elle a dû remanier son gouvernement.


On la dit déprimée à la suite d’un scandale de corruption dont le protagoniste est son fils aîné, Sebastián Dávalos. Ce dernier est accusé de trafic d’influence après avoir obtenu un prêt bancaire de 10 millions de dollars destiné à des investissements immobiliers. M. Dávalos a nié les faits, et Mme Bachelet a affirmé n’avoir jamais été au courant de cette transaction.

Plusieurs affaires de fraude fiscale et de financement illicite de campagnes électorales éclaboussent les partis politiques, en particulier l’Union démocrate indépendante (droite). Huit sénateurs et plusieurs hommes d’affaires sont impliqués. Mme Bachelet a créé une commission anti­corruption afin d’assurer une plus grande transparence dans le financement des partis politiques et les dons des grandes entreprises.


Des analystes dénoncent aussi une répression de plus en plus dure à l’égard des mouvements sociaux. Le sociologue Marcos Roitman donne en exemple les manifestations étudiantes et celles des indiens Mapuche, dans le sud du pays. Il rappelle la mort, fin juillet, d’un ouvrier du cuivre, tué par la police, lors d’une mobilisation pour réclamer des augmentations de salaires.