mercredi 6 mai 2015

AU CHILI, MICHELLE BACHELET TENTE DE REPRENDRE LA MAIN

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LA PRÉSIDENTE MICHELLE BACHELET EN DÉCEMBRE 2014, AU MEXIQUE.

La société chilienne est désabusée face aux promesses que la présidente n’a pas tenues jusqu’à présent pour en finir avec l’héritage de Pinochet en matière d’éducation – source de manifestations récurrentes des étudiants qui réclament la gratuité de l’enseignement –, mais aussi dans le domaine de la santé et du droit du travail. Les profondes inégalités sociales n’ont pas été résorbées dans un pays où la classe dirigeante forme une élite réduite avec des liens de familles, d’amitiés et d’affaires.

31 % d’opinions favorables

La cote de popularité de Mme Bachelet est au plus bas, avec 31 % d’opinions favorables. La présidente a fait récemment son mea culpa, précisant toutefois « qu’elle ne pensait pas démissionner, d’aucune façon » et estimant que la réforme de la Constitution pourrait être « une importante occasion de rétablir la confiance ». « Cette réforme devra déboucher sur une nouvelle Charte fondamentale entièrement démocratique et citoyenne », a souligné la présidente. Cette réforme était l’une de ses principales promesses électorales. Michelle Bachelet a été élue en décembre 2013, après un premier mandat présidentiel entre 2006 et 2010.

L’annonce a été faite au cours de la première allocution de Mme Bachelet à la télévision depuis le scandale impliquant son fils aîné, Sebastian Davalos, 36 ans, accusé de trafic d’influence. La présidente a également promis une réforme pour combattre la corruption, qu’elle entend « conduire personnellement, avec toute mon énergie et sans peur ». L’objectif est d’assurer une plus grande transparence dans le financement des partis politiques et les donations des grandes entreprises. Un rapport en ce sens a été élaboré par un comité d’experts indépendants, à la demande de la présidente.

Celle-ci a avoué vivre « des moments difficiles et douloureux, comme mère et présidente », à la suite de l’affaire « Nueragate » (de nuera, « belle-fille » en espagnol). Le fils de Mme Bachelet avait participé à une réunion de son épouse, Natalia Compagnon, avec un haut fonctionnaire de la Banque du Chili, en 2013, afin de solliciter, en pleine campagne électorale, un prêt de 10 millions de dollars (9 millions d’euros) pour des investissements immobiliers qui auraient rapporté au couple 4 millions de dollars de bénéfice. Le crédit a été accordé à la nuera au lendemain de l’élection de sa belle-mère à la présidence de la République.

Fraude fiscale et de financement illicite

Sebastián Dávalos a dû démissionner, à la mi-février, de son poste, non rémunéré, de directeur socioculturel de la présidence. Il a « humblement demandé pardon pour ce triste épisode », niant toutefois avoir commis « le moindre acte illicite ou criminel ». Pour sa part, Mme Bachelet a affirmé n’avoir jamais été au courant de cette transaction.

A cela s’ajoutent d’autres scandales de fraude fiscale et de financement illicite de campagnes électorales. De puissants entrepreneurs sont impliqués dans ces affaires, qui éclaboussent surtout l’Union démocrate indépendante (UDI, droite). Son président, Ernesto Silva, a démissionné le 12 mars 2015.

« La corruption est arrivée au Chili » : cette phrase lancée par un ancien responsable de la Cour des comptes, Ramiro Mendoza, reflète le malaise et la stupeur des Chiliens face à la remise en cause de leur réputation de modèle de probité en Amérique latine. « La corruption peut exister au Chili, mais elle n’est pas généralisée. Tout le monde n’est pas corrompu dans notre pays », a assuré Michelle Bachelet. La présidente a rappelé que plusieurs hommes d’affaires sont en prison, depuis mars, montrant qu’il n’y avait aucune entrave à la justice quand il s’agissait de lutter contre la corruption. Même quand elle touche ses proches.