vendredi 24 août 2012

CHILI : DES EXPERTS DE L’ONU ENQUÊTENT SUR LES DISPARITIONS FORCÉES SOUS PINOCHET


« Les procès sont trop lents, explique l’Argentin Ariel Dulitzky. Une loi d’amnistie est toujours en vigueur. La plupart des peines qui sont prononcées sont très basses et elles ne sont pas toujours suivies de prison. Nous pensons que ce n’est pas compatible avec le délit de disparition forcée ».

Pour la présidente de l’association des familles de disparus Lorena Pizarro, ces premières conclusions sont une victoire : « Nous, nous avons demandé exactement la même chose, et le gouvernement n’a jusqu’ici rien fait ». Des recommandations de l’ONU l’inspireront peut-être davantage.
MME LORENA PIZARRO, PRÉSIDENTE DE L’ASSOCIATION DES FAMILLES DE DÉTENUS DISPARUS, LORS DE LA CÉRÉMONIE FUNERAIRE POUR TROIS MILITANTS, DONT LES DÉPOUILLES ONT ÉTÉ RÉCEMMENT RÉCUPÉRÉES ET IDENTIFIÉES. LE COMBAT DES FAMILLES CONTINUE ENCORE ET TOUJOURS, CAR DES CENTAINES DE DISPARUS N’ONT TOUJOURS PAS ÉTÉ RETROUVÉS.

« Les enquêtes ouvertes sur les cas de disparitions forcées et les condamnations qui se sont ensuivies sont d'importantes réalisations pour le Chili dans la lutte contre l'impunité s'agissant des graves violations des droits de l'homme », se sont félicités deux expertes du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires au terme de leur mission dans ce pays. Elles ont toutefois reconnu qu'il restait d'importants défis à relever.

« En raison des faibles condamnations prononcées et d'autres largesses accordées, très peu des ravisseurs purgent actuellement une peine », ont commenté Mme Jasminka Dzumhur et Ariel Dulitzky. « La Déclaration sur la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées requiert pourtant des États que les actes de disparitions forcées soient punis à la mesure de la gravité du crime commis », ont-elles ajouté.
CHILI, 1988 : OÙ SONT-ILS ?. LA DISPARITION FORCÉE DES DÉTENUS, AVEC LA TORTURE ET LES EXÉCUTIONS SOMMAIRES D’OPPOSANTS POLITIQUES, ONT ÉTÉ DES PRATIQUES COURANTES DES DICTATURES MILITAIRES QUI ONT PRIS D’ASSAUT LES PAYS DU CÔNE SUD PENDANT LES DECENNIES 70 ET 80. APPRISES À L’ÉCOLE MILITAIRE AMÉRICAINE, CES « TECHNIQUES » PROVOQUAIENT UN CLIMAT DE TERREUR GÉNÉRALISÉ, CHERCHAIENT À DÉMOBILISER L’OPPOSITION POLITIQUE ET PARALYSER LA SOCIÉTÉ CIVILE, CONSIDERÉE COMME « ENNEMI INTÉRIEUR ». PHOTO JAVIER BAULUZ - PIRAVAN

Depuis le retour de la démocratie au Chili, d'importantes mesures ont été prises par ce pays pour rétablir vérité et justice, procéder aux réparations nécessaires et cultiver un devoir de mémoire concernant les graves violations commises sous la dictature militaire. Les différents mémoriaux constituent une reconnaissance collective nationale des violations et de leur condamnation unanime, ont souligné les experts. Mais l'État chilien devrait renforcer sa responsabilité et son leadership pour veiller à ce que ces initiatives, lancées le plus souvent par les familles des victimes, fassent partie d'une politique globale, cohérente et permanente.

« La validité du décret-loi de 1978 représente un danger caché et devrait être expressément rejeté », ont estimé les expertes, pour lesquelles d'importants défis demeurent, comme la lenteur des procédures judiciaires et les retards de mise en œuvre de la justice militaire, mais aussi le fait que le crime de disparition forcée ne soit pas reconnu à part entière et l'absence d'un plan national pour rechercher les personnes disparues.

Mme Dzumhur et Dulitzky, deux des cinq membres du groupe, se sont rendues au Chili du 13 au 21 août afin d'y évaluer les différentes initiatives et politiques lancées par le Chili sur les disparitions forcées ou involontaires. Les informations collectées à cette occasion figureront dans un rapport qui sera présenté au Conseil des droits de l'homme lors de sa session de mars 2013.


http://www.un.org/apps/newsFr/storyF.asp?NewsID=28803&Cr=Chili&Cr1= 22 août 2012 –