mercredi 25 janvier 2012

EX AGENTS DE LA DICTATURE MILITAIRE CONDAMNÉS POUR LA DISPARITION DE 3 DÉTENUS À COLONIE "DIGNIDAD"

ELIZABETH REKAS URRA, 27 ANS, ASSISTANTE SOCIALE DU METRO, ENCEINTE DE QUATRE MOIS AU MOMENT DE SA DÉTENTION, ET SON MARI, ANTONIO ELIZONDO ORMAECHEA, INGÉNIEUR DE 29 ANS, TOUS DEUX MILITANTS DU PARTI MAPU (GAUCHE). ILS ONT ÉTÉ ENLEVÉS EN PLEIN CENTRE VILLE DE SANTIAGO LE 26 MAI 1976. ILS SONT PASSÉS PAR LA MAISON DE TORTURES DE VILLA GRIMALDI ET EMMENÉS ENSUITE À COLONIA DIGNIDAD, D’OÙ ILS SONT DISPARUS COMME DES CENTAINES D’AUTRES VICTIMES DE LA DICTATURE. PHOTO : MÉMOIRE VIVANTE.
JUAN BOSCO MAINO CANALES
Les victimes sont Juan Maino Canales, 27 ans, Antonio Elizondo Ormaechea, 29 ans, et son épouse Elizabeth Rekas Urra, de 27 ans, qui était enceinte lors de leur arrestation à Santiago le 26 mai 1976.Les trois prisonniers ont été emmenés d’abord à la Villa Grimaldi, maison de tortures tenue à Santiago par la DINA, et transférés ensuite à la « colonie  Dignidad », enclave néo-nazi près de la ville de Parral, 350 km au sud de Santiago.
Les sbires de la police politique de Pinochet se sont aussi emparés de deux véhicules appartenant aux victimes, qui ont été vus par la suite à la Colonie Dignidad, où ils étaient utilisés par des membres de la colonie.

Dignidad était une colonie agricole sectaire fondée au Chili en 1961 par des expatriés allemands, dont notamment Paul Schäfer, brancardier de la Waffen SS et ancien nazi qui a fuit dans les années 60 à un procès pour actes de pédophilie en Allemagne.

La « colonie » c’est une enceinte de 15 000 hectares, clôturée par des barbelés et pourvue de sophistiqués dispositifs d’écoute et de surveillance, où quelques 300 colons d’origine allemande ont vécu en autarcie. Un petit état dans l’état, où durant des décennies a régné en maître Paul Schäfer, pasteur luthérien, gourou néo-nazi et pédophile notoire, qui a pratiqué des sévices sexuelles sur des enfants pendant des longues années, et a prêté une très active collaboration à la répression des opposants politiques à la dictature militaire de Pinochet.

Des hauts dignitaires du régime militaire, des membres de la junte au pouvoir et les responsables des appareils répressifs de la dictature étaient périodiquement invités dans la « Colonie ». Des nombreuses découvertes y ont été réalisées lors des perquisitions policières à la fin de la dictature : des caches d’armes et du matériel de guerre, des véhicules volés aux victimes de la répression 
enfouis et des charniers clandestins. Et l’énorme domaine n’a pas encore livré tous ses secrets. En 1991, après Pinochet, elle perd son statut protégé et devient la Villa Baviera.

Comme il a été établi lors de l’instruction de ce dossier -et selon des témoignages de survivants ayant déposé dans plusieurs autres investigations-, la Colonie Dignidad a été utilisée par la dictature militaire comme centre de détention et mise au secret, de tortures et d’élimination d'opposants politiques.

Le leader de l'enclave Paul Schäfer était aussi inculpé dans ce dossier, mais il est mort en prison en 2010, alors qu’il purgeait une peine pour des abus sexuels contre des mineurs.

L'ex-chef de la DINA Manuel Contreras écope donc de dix ans et un jour, et il cumule ainsi des condamnations pour près de 250 ans de prison dans  nombreux cas de violations aux droits de l'homme.

La même peine est attribuée au colonel Carlos López Tapia,  qui fut membre de la caravane de la mort, ex-chef de Villa Grimaldi, ancien maire nommé par Pinochet et responsable de plusieurs meurtres et disparitions d’opposants.

Eugenio Fieldhouse Chávez, ex-agent DINA et ancien préfet de la police civile  d’Investigations écope de 5 ans et un jour de prison pour complicité des séquestrations suivies de mort.

Gerard Mücke Koshipzke, membre de la Colonie Dignidad et ancien garde de corps de Schäfer, complice, est condamné à 5 ans et un jour.

Karl Johann Van der Berg Schurmann, membre de Dignité, 5 ans et un jour de prison comme complice.

Le juge a prononcé aussi le classement temporel pour le médecin Hartmutt Hopp, en fuite en Allemagne depuis l'année dernière pour échapper au procès dans d'autres dossiers en cours. Une demande d’extradition est en cours devant la justice allemande.