mercredi 15 juin 2011

SANTIAGO DU CHILI ASPHYXIÉE PAR LA POLLUTION

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Image du phénomène océano-atmosphérique connu comme La Niña prise le 3 septembre 2010. Credit NASA / JPL Ocean Surface Topography Team
La nappe de brume grise au dessus de Santiago, qui lors des pics de pollution bouche le majestueux arrière-plan des sommets enneigés des Andes, est devenue une image traditionnelle associée à la métropole de plus de six millions d'habitants, une des plus polluées d'Amérique latine après Mexico.

Ces jours-ci, la nappe s'installe, et cette fin d'automne austral associée à une absence de pluie due au phénomène climatique "La Niña", font craindre le pire pour l'hiver imminent.


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Le ministre Mañalich a demandé par téléphone le soutien à son collègue le ministre de  Transports, Pedro Pablo Errázuriz, pour appliquer les mesures de suspension ou de restriction de la circulation. Photo AGENCIAUNO
Trois journées déjà depuis début mai, une "pré-alerte" sanitaire a été déclarée par les autorités: elle entraine une restriction de circulation de l'ordre de 20%, paralyse quelque 500 activités industrielles sur la métropole, et déconseille la pratique des sports de plein air.

"Nous observons un changement dramatique de la situation épidémiologique, des affections respiratoires, surtout chez les enfants, depuis deux-trois semaines, en lien direct avec la pollution, une année de sécheresse, et beaucoup de poussière dans l'atmosphère", a déclaré le ministre de la Santé Jaime Mañalich.

Déjà, les services d'urgences ont relevé ces dernières semaines une hausse de 23% des admissions, à 80% pour affection des voies respiratoires.

"La pollution atmosphérique se traduit directement par une augmentation des cas (d'affections) car les voies respiratoires s'irritent, et deviennent plus vulnérables à des agents pathogènes", explique la pédiatre pneumologue Rebeca Paiva.


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Les indicateurs inquiétants actuellement sont la présence, anormalement tôt dans l'année, du virus syncytial, cause d'infection respiratoire qui peut être très grave, voire mortelle chez les enfants de moins de six mois. En principe, le virus n'apparait à Santiago que vers la fin août.

Parallèlement, les services de santé ont recensé quatre fois plus de cas de toux convulsives que la normale, une autre affection qui peut s'avérer fatale chez les nourrissons.

"Cet hiver va être très difficile, beaucoup d'enfants vont être hospitalisés, et beaucoup vont se retrouver dans un état très sérieux", a d'ores et déjà prévenu Mañalich. Et cela, indépendamment d'un éventuel mieux sur le plan de la pollution atmosphérique.

Le ministère de la Santé a débloqué 5 millions de dollars pour des renforts de personnel soignant, et mobilisé 500 lits programmés pour des opérations non urgentes.

Pour autant, l'alerte sanitaire n'est pas encore envisagée; la dernière avait été déclarée pour la grippe H1N1 en 2009, qui avait tué 120 personnes au Chili, et affecté près de 12.000 personnes.

La situation sanitaire actuelle a relancé le débat, récurrent, sur l'air de Santiago.

La capitale chilienne parait à bien des égards condamnée à la pollution, à la fois par son encaissement géologique, entre collines et montagnes, l'absence de vents brassant les particules, et sa croissance continue: sa population a triplé en 50 ans, son parc automobile (1,3 millions) au diapason.

La crise respiratoire a fait aussi tousser au gouvernement: le ministre de la Santé a réclamé une réflexion n'excluant "aucune initiative" pour dépolluer Santiago, comme des restrictions de circulation à caractère permanent. "Pas dans les projets" du gouvernement à ce stade, a répliqué sa porte-parole.