dimanche 9 août 2009

1ère tentative française de traversée de la cordillère Darwin en octobre

La cordillière Darwin au Chili, le 2 septembre 2008. Photo AFP
Charles Darwin découvrit en 1832 lors de son voyage sur le Beagle - prélude à l'élaboration de sa théorie de l'évolution - cette "terra incognita" montagneuse et semi-glaciaire qui s'étend sur 170 km dans les 50e hurlants, au Nord-Ouest du cap Horn.
Mais le naturaliste qui, saisi par la beauté sauvage et inviolée de cette queue méridionale de la cordillère des Andes, lui donna son nom, n'en parcourut que les contreforts.
Quelques expéditions internationales se sont aventurées dans certaines parties (les plus accessibles) de cette chaîne de montagnes de la Terre de Feu, mais aucune n'est parvenue à ce jour, à l'explorer dans sa totalité.
En 2007, l'explorateur franco-suisse Christian Clot, parti en solitaire, fut le premier homme à fouler le coeur même de la cordillère. Mais, sans assistance, en but à mille dangers mortels, il n'a pu aller au bout de sa tentative de traversée intégrale.
Ils sont abonnés aux toits du monde, des Alpes à l'Himalaya et des Andes à l'Asie Centrale: la dizaine d'alpinistes et guides de haute montagne (GHM) qui ont relevé ce défi sans précédent baptisé "Un rêve de Darwin", sont des "pros" des cimes qui ne comptent plus le nombre de voies classées ED (extrêmement difficiles) à leur actif sur tous les continents.
Leur chef d'expédition n'est pas le moins titré... Yvan Estienne, 58 ans dont 40 ans de montagne, est guide au pays des Ecrins. Il a notamment dirigé plus de 20 expéditions dans l'Himalaya (Everest, Makâlû...) et signé de nombreuses premières mondiales par des voies considérées impraticables.
"Je n'ai jamais fait un parcours aussi tortueux et inconnu, dit-il. C'est une grande aventure humaine, un projet collectif où la mise en commun de nos connaissances ainsi que l'esprit d'équipe et de solidarité seront déterminants".
Les alpinistes entendent gravir une dizaine de sommets vierges, tout au long de leur traversée.
Pierre Muller, également GHM, est le médecin urgentiste de l'expé. Lorsqu'il n'est pas accroché à une paroi entre ciel et terre au Népal ou au Kirghiztan, il exerce à l'hôpital de Briançon (Hautes-Alpes).
"Compte tenu du climat, l'un des plus redoutables du globe, qui sévit dans cette région totalement isolée (vents de plus de 200 km/h, violentes précipitations de neige et de pluie, brouillard, crevasses et avalanches), nous ne devrons compter que sur nous-mêmes. Appeler des secours est plus qu'aléatoire", souligne-t-il.
Dans la tradition des explorations naturalistes du XVIIIe siècle, "Un rêve de Darwin" se double d'une mission scientifique à spectre large: étude des écosystèmes dans la forêt primaire qui borde la cordillère (CNRS), "carottages" pour retracer l'histoire du champ glaciaire inconnu (2.300 km2, équivalent de l'ensemble des glaciers des Alpes), et "étude du management d'équipe dans des environnements à hauts risques" (Agence Nationale de la Recherche).
"Etre les premiers hommes à traverser cette zone perdue de Patagonie, à atteindre ses sommets inconnus, à skier sur des glaciers que personne n'a encore foulés... et le faire partager au plus grand nombre", voila ce "rêve de Darwin", dit le docteur Muller.