samedi 5 juillet 2008

Le Mercosur condamne la xénophobie européenne et les subventions agricoles

Les présidents Cristina Kirchner (Argentine), Luiz Inacio Lula da Silva (Brésil), Nicanor Duarte (Paraguay), Evo Morales (Bolivie), Hugo Chavez (Venezuela), Michelle Bachelet (Chili) et Tabaré Vazquez (Uruguay), ainsi que des ministres représentant l'Equateur, la Colombie et le Pérou ont condamné sans surprise la nouvelle politique d'immigration de l'Union européenne (UE), dite "directive retour" perçue sur le continent sud-américain comme manifestation xénophobe.

"Les présidents des Etats parties au Mercosur et les Etats associés rejettent toute intention de criminalisation de la migration irrégulière et l'adoption de politiques migratoires restrictives, en particulier visant les populations les plus vulnérables, les femmes et les enfants", lit-on dans le texte de la déclaration finale de ce XXXVe sommet du Mercosur.

La déclaration des 10 gouvernements latino-américains souligne en outre "la nécessité de lutter contre le racisme, la discrimination, la xénophobie et toutes autres formes d'intolérance".

Ces 10 pays ont exhorté les pays développés à "éviter les subventions multi-millionnaires qui faussent la compétitivité ainsi que le manque d'ouverture de leurs marchés aux produits émergents", qui "accentuent les motifs de migrations, que sont la pauvreté structurelle et l'exclusion".

"Nous ne pouvons pas rester silencieux, ni nous contenter de protester", a estimé le président vénézuélien Chavez: "il faut prévoir des actions si l'Europe civilisée a légalisé la barbarie".

Plus tôt, le Bolivien Evo Morales avait annoncé qu'il n'écartait pas l'adoption de mesures de représailles contre le texte de l'UE qu'il a baptisé "Directive de la honte". Il a évoqué par exemple l'éventuelle interruption des négociations commerciales en cours entre la Communauté andine des Nations et l'UE.

Le sommet du Mercosur a aussi examiné la crise alimentaire mondiale alors que l'ONU s'est alarmé du risque de voir de 800 à 860 millions d'êtres humains confrontés à la faim. En Amérique latine, près de 200 millions de personnes, soit 40% de la population, vivent dans la pauvreté.

Le Brésilien Lula a déclaré qu'il avait l'intention lors de la prochaine réunion du Groupe des huit pays les plus industrialisés (G8) le 7 juillet au Japon, de les confronter à leurs responsabilités dans la hausse des prix des combustibles et des aliments.

"Je vais dire au Sommet du G8 au Japon certaines choses que j'ai dites ici pour voir si là-bas il y a quelqu'un qui tient les propos qui doivent être tenus", a annoncé le président brésilien.

A l'ouverture de la réunion, Mme Kirchner avait rappelé qu'"il y a peu de temps encore, personne n'imaginait que le problème alimentaire s'étendrait si rapidement, avec des scènes dignes du Moyen-Age, des gens qui meurent en se battant pour des miettes de nourriture, pour un croûton de pain".

La présidente argentine avait attiré l'attention sur la hausse des prix du pétrole, flirtant avec les 140 dollars le baril, et de ceux du soja - dont son pays est le premier producteur mondial - à presque 600 dollars la tonne.

"Le +casino+ de la finance est devenu désormais le +casino+ des aliments", s'est indignée Mme Kirchner dont le gouvernement est confronté à un conflit d'une ampleur sans précédent avec les agriculteurs en grève contre la fiscalité élevée à laquelle sont soumises les exportations agricoles.